J-12-227
1) RECOUVREMENT DE CREANCE — INJONCTION DE PAYER — CREANCE — CARACTERES — CREANCE CERTAINE (OUI) — ABSENCE DE PREUVE DE L’INCERTITUDE DE LA CREANCE — NULLITE DE L’INJONCTION DE PAYER (NON).
2) RECOUVREMENT DE CREANCE — INJONCTION DE PAYER — DEMANDE DE DELAI DE PAIEMENT — ABSENCE DE PREUVE DES DIFFICULTES — REJET.
1) Faute pour lui d’apporter la preuve des éléments justifiant l’incertitude de la créance dont le recouvrement est poursuivi et dès lors qu’il ressort des débats que la créance remplit les conditions de l’article 1 de l’AUPSRVE, le débiteur ne peut obtenir la nullité de l’ordonnance d’injonction de payer obtenue par le créancier en recouvrement de sa créance.
2) Le débiteur poursuivi en paiement ne peut obtenir les délais de grâce de l’article 39 AUPSRVE que s’il apporte les éléments à l’appui des difficultés de paiement alléguées. En l’absence de ces éléments justificatifs lui permettant d’apprécier la demande, le juge saisit doit rejeter la demande de délai de grâce formulée par le débiteur.
Article 1 AUPSRVE
Article 39 AUPSRVE
TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DE DOUALA-BONANJO, JUGEMENT N°135/COM DU 19 OCTOBRE 2011, LA SOCIETE OPOC PETROLEUM SA CONTRE SIEUR KUIGOUA RENE EMMANUEL
LE TRIBUNAL
Vu les lois et règlements en vigueur;
– Vu les pièces du dossier de la procédure et les débats en audience publique;
– Après en avoir délibéré conformément à la loi;
– Attendu que par exploit du 04 février 2011 dûment enregistré le 16 février 2011 de Maître ATTEGNIA Ernestine, Huissier de justice à douala, la société OPOC PETROLEUM SA, société anonyme dont le siège social est à Douala BP : 5284, agissant poursuites et diligences de son représentant légal ayant pour conseil Maître PARA ISSOFA, Avocat au Barreau du Cameroun, en l’étude duquel il fait élection de domicile, a fait dire et déclarer à sieur KUIGOUA Réné Emmanuel demeurant à Douala et ayant pour conseil Maître Yvonne TANKEU, Avocat au Barreau du Cameroun, qu’il forme opposition formelle contre l’ordonnance d’injonction de payer n°025/COM rendue le 14 janvier 2011 par madame la présidente du Tribunal de céans à la requête de ladite société et à lui signifié par exploit de Maître Guy EFON, Huissier de justice à Douala, le 02 février 2011 et, à même requête, demeure et élection de domicile, lui a fait donner assignation d’avoir à se trouver et comparaître devant le Tribunal de Première Instance de céans statuant en matière civile et commerciale pour est-il dit dans le dispositif de l’exploit, « y venir le sus requis »;
– Recevoir la requérante en son opposition et y faisant droit;
– Constater la très bonne foi de la requérante matérialisée par le paiement déjà effectif de plus de trois quarts de la créance initiale de sieur KUIGOUA;
– Constater que le non paiement par la requérante du solde de sa dette vis-à-vis de sieur KUIGOUA est du à une cause conjoncturelle et indépendante de sa volonté;
EN CONSEQUENCE
Reporter le paiement par la requérante de sa dette envers sieur KUIGOUA dans la limite d’une année conformément aux dispositions de l’article 39 alinéa 2 de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution;
– Annuler partant purement et simplement l’ordonnance d’injonction de payer n°025/COM rendue le 14 janvier 2011 par madame la Présidente du Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo dont s’agit avec toutes les conséquences de droit;
– Condamner KUIGOUA Réné Emmanuel aux entiers dépens distraits au profit de Maître PARA ISSOFA, Avocat aux offres de droit;
– Attendu que toutes les parties se sont représentées et ont produit leurs moyens et conclusions, qu’il échet de statuer contradictoirement à leur égard;
– Attendu qu’au soutien de son action, la société OPOC PETROLEUM SA expose que courant 2010, sieur KUIGOUA Réné Emmanuel lui a fait livraison de certains équipements pour une valeur globale de 7.280 000 FCFA;
– Que dans le cadre de cette relation d’affaire, elle a déjà versé la somme totale de 6 000 000 FCFA, représentant plus de trois quarts de la créance initiale, ce qui témoigne de sa bonne foi;
– Qu’en sa qualité de jeune entreprise dont l’activité consiste en la distribution des produits pétroliers, elle s’est trouvée butée à la décision du Ministre de l’énergie et de l’eau, conditionnant son accès aux produits pétroliers qu’elle est censée distribuer par la création de sa première station;
– Que cette condition l’a entraîné dans l’impossibilité de générer des revenus, d’où sa situation d’impécuniosité actuelle;
– Qu’une fois la station opérationnelle dans les prochaines semaines au regard des concours financiers à elle promis par des partenaires, elle pourra reprendre ses activités et lui solder sa dette à partir des revenus ainsi générés;
– Qu’elle sollicite qu’un délai de grâce d’une année lui soit ainsi accordé pour l’apurement de cette dette, et que sa demande étant conforme à l’article 39 alinéa 2 de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, il y a tout lieu d’y faire droit;
– Attendu que pour faire échec aux prétentions de la demanderesse, sieur KUIGOUA Réné Emmanuel excipe l’argument selon lequel il est acquis en droit que l’ordonnance d’injonction de payer ne peut être annulé ou rétracté que si elle a été rendue sur le fondement d’une créance ne remplissant pas les conditions cumulatives de certitude, de liquidité et d’exigibilité;
– Que la requérante elle-même ne conteste pas que sa dette est autant certaine, liquide qu’exigible comme le veut bien les dispositions de l’article 1er de l’Acte Uniforme n°6;
– Qu’en plus, la demande d’un délai de grâce qui consiste à retarder l’exécution d’une obligation ne saurait juridiquement entraîner la nullité d’une ordonnance d’injonction de payer;
– Qu’il est également curieux que la plaignante vienne aujourd’hui alléguer des difficultés financières, pour justifier le non paiement de sa modeste dette tant est si bien qu’à plusieurs reprises, le requis a voulu susciter en elle la demande d’un échéancier par sa lettre de mise en demeure du 1er décembre et la sommation de payer à elle servie le 21 décembre 2010, restées sans effet;
– Que bien plus, sa mauvaise foi est manifeste dès lors qu’au lieu de négocier un délai de paiement, elle a plutôt préféré exposer les frais d’huissier, de consignation au Greffe, d’honoraires d’avocat pour initier la présente procédure, alors que cet argent lui aurait certainement permis d’éponger sa dette;
– Que des développements qui précédent, il échet de rejeter ladite opposition et sa demande de délai de grâce comme non fondée;
– Attendu que la demanderesse sollicite l’annulation purement et simplement de l’ordonnance d’injonction de payer n°025/COM rendue le 14 janvier 2011 par madame la Présidente du Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo dont s’agit avec toutes les conséquences de droit motif pris de ce que la créance n’est plus certaine;
– Mais attendu qu’il ressort des débats et des pièces l’alimentant que la créance dont le recouvrement est poursuivi par sieur KUIGOUA remplit parfaitement les conditions de l’article 1er de l’AUVE, ainsi que celles de l’article 1244 du Code Civil qui dispose que « le débiteur ne peut forcer le créancier à recevoir en partie le paiement d’une dette, même divisible »;
– Que bien plus, cette demande n’est soutenue par aucun moyen aussi bien de fait que de droit, pouvant permettre au tribunal d’en faire une appréciation à juste titre;
– Que le droit ne s’accommodant point des déclarations évasives et sans fondement, elle mérite d’être rejetée pour ce motif;
– Attendu par ailleurs que la saisissante sollicite que le paiement de ladite dette soit reporté dans la limite d’une année;
– Attendu cependant que conformément aux dispositions de l’article 39 alinéa 2 de l’AUVE, « compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, la juridiction compétente peut (…) reporter ou échelonner le paiement des sommes dues dans la limite d’une année »;
– Que le Code de Procédure Civile et Commerciale ajoute en son article 221 alinéa 2 que « les juges pourront suivant les circonstances suspendre l’exécution du jugement » en fonction de la production des éléments leur permettant d’asseoir leur conviction;
– Attendu qu’en l’espèce, la société OPOC PETROLEUM SA n’a produit au dossier de procédure aucun élément pour justifier ses déclarations et emporter éventuellement conviction du tribunal;
– Qu’en l’absence d’éléments justificatifs, il ne saurait juridiquement apprécier une telle demande;
– Qu’il y a tout lieu de la rejeter comme non justifiée;
– Attendu que conformément à l’article 50 du Code de Procédure Civile et Commerciale suscité, la partie qui succombe à un procès en supporte les conséquences;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties en matière commerciale et en premier ressort;
– Reçoit la société OPOC PETROLEUM SA BP : 5284 Douala en son opposition comme faite dans les forme et délai de la loi;
– L’y dit cependant non fondée;
– Fait par conséquent injonction à ladite société d’avoir à payer à sieur KUIGOUA Réné Emmanuel la somme totale de 1.480 000 FCFA ventilée comme suit :
– 1.280 000 FCFA en principal;
– 200 000 FCFA représentant les intérêts et frais;- Condamne la demanderesse à l’opposition aux dépens dont distraction au profit de Maître TANKEU Yvonne, Avocat aux offres de droit;
– (…)