J-13-106
PROPRIETE INDUSTRIELLE — NOM COMMERCIAL — USURPATION — ASSIGNATION EN INTERDICTION D'UTILISER LE NOM COMMERCIAL — EXCEPTION D'INCOMPETENCE RATIONAE MATERIAE
JUGE DES REFERES — COMPETENCE — ARTICLE 207 CPCCAF — MESURES PROVISOIRES — INTERDICTION D'UTILISER UN NOM COMMERCIAL — MESURE DEFINITIVE — PREJUDICIABLE AU FOND DU LITIGE (OUI) — INCOMPETENCE DU JUGE DES REFERES (OUI)
Conformément aux dispositions de l'article 207 CPCCAF, le juge des référés ne peut qu'ordonner des mesures conservatoires et de sauvegarde sans préjudicier le fond du litige. En l'espèce, l'interdiction d'utiliser le nom commercial ne constitue pas une mesure conservatoire ou de sauvegarde, mais au contraire, une mesure définitive préjudiciant le fond du litige. Dès lors, la question ne relève pas du de la compétence de juge des référés, mais plutôt du juge du fond.
Article 57, 180, 207, 217 CPCCAF
Article 16 ANNEXE V ACCORD DE BANGUI DE 1977
Article 98 AUSCGIE
(Tribunal de commerce de Pointe-Noire, Ordonnance De Référé N° 162 Du 21 Septembre 2009, Bakala Raymond C/ Bakala Antoinette et Diabanzolo Pierre)
L'an deux mil neuf;
Et le vingt et un du mois de septembre;
Par devant Nous, …Président du Tribunal de commerce de Pointe-Noire, tenant audience ordinaire de référés en son cabinet sis au Palais de justice de Pointe-Noire;
Attendu que par requête en date à Pointe-Noire du 26 août 2009, monsieur BAKALA Raymond a assigné par devant le présent juge monsieur DIABANZOLO Pierre et Madame BAKALA Antoinette aux fins d'interdiction d'utiliser le nom commercial;
Qu'à l'appui de sa requête, elle expose :
Qu'il est promoteur d'une entreprise unipersonnelle dénommée PRESTA SERVICES spécialisée dans le domaine des prestations de services divers, laquelle avait reçu l'autorisation préalable du Ministère de l'Education nationale d'étendre ses activités par l'ouverture d'un établissement d'enseignement privé sous le nom du COMPLEXE SCOLAIRE SAINTE CLAIRE;
Qu'il a implanté ladite structure dans les quartiers suivants : Mpaka, Voungou et Mbota;
Que bien plus tard, il a cru bon donner à bail les locaux à des tiers preneurs, DIABANZOLO Pierre et BAKALA Antoinette, tout en leur autorisant de faire usage du nom COMPLEXE SCOLAIRE SAINTE CLAIRE;
Que peu après ces derniers, au lieu de s'en tenir à cette autorisation, ont jugé utile d'ouvrir leur propre école sous le label de l'Ecole privée Sainte Claire, précisément à côté de l'inspection de Tié-Tié, en face de l'église Pentecôte;
Que dès lors, il y a une confusion invraisemblable d'identité des deux établissements;
Que devant ce constat, monsieur DIABANZOLO Pierre et Madame BAKALA Antoinette, n'ont pas respecté leurs engagements vis-à-vis de lui;
Qu'il en découle une usurpation du nom commercial Sainte Claire par ces derniers et ceci lui cause un préjudice;
Qu'il sollicite que soit ordonné l'interdiction aux consorts BAKALA Antoinette, d'utiliser le nom commercial de l'Ecole privée Sainte Claire, et ce sous astreinte comminatoire de la somme de 250.000 F.CFA par jour de retard;
Attendu que par note en délibéré en date du 7 septembre 2009, monsieur DIABANZOLO Pierre et Madame BAKALA Antoinette ont soulevé l'incompétence matérielle du présent juge et l'irrecevabilité de l'action de monsieur BAKALA Raymond;
Qu'ils rétorquent :
Qu'une action en interdiction de l'usage d'un nom commercial relève de la compétence exclusive du juge civil, en application de l'article 16 alinéa 1er et 2 de l'annexe V du titre 1er de l'accord de BANGUI du 2 MARS 1977 qui dispose :
« 1) Lorsque les droits attachés au nom commercial sont menacés de violation, le titulaire de ces droits peut intenter toute action judiciaire destinée à prévenir cette violation.
2) En cas de violation des droits visés à l'alinéa 1 précédent, le titulaire desdits droits peut en interdire la continuation et demander le paiement de dommages intérêts ainsi que l'application de toute autre sanction prévue par le droit civil »;
Qu'en portant ce litige devant le juge commercial, monsieur BAKALA Raymond s'est trompé de juridiction;
Qu'il échet de se déclarer incompétent rationae materiae;
Que la demande de monsieur BAKALA Raymond n'est pas de la compétence de juge des référés en application des dispositions de l'article 207 du code de procédure, civile, commerciale, administrative et financière qui limitent la compétence de celui-ci qu'à ordonner les mesures provisoires ne préjudiciant pas au fond du litige;
Que les interdire d'utiliser le nom commercial Ecole privée Sainte Claire n'est pas une mesure provisoire;
Que pareille décision préjudicie le fond du litige;
Que de ce chef également, le juge des référés doit se déclarer incompétent;
Que le sieur BAKALA Raymond a introduit la présente instance en tant que représentant légal de la société PRESTA SERVICES, propriétaire du complexe scolaire Sainte Claire;
Qu'il ne fournit aucune indication sur l'immatriculation de la société PRESTA SERVICES au registre du commerce et du crédit mobilier;
Que relativement à cette question, l'article 98 de l'Acte uniforme de l'OHADA du 17 avril 1977 relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique dispose que :
« Toute Société jouit de la personnalité juridique à compter de non immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier... »;
Que la Société PRESTA SERVICES n'étant pas immatriculé au registre du commerce et du crédit mobilier, n'a donc pas capacité d'ester en justice;
Que rationnellement, si ladite Société ne peut ester en justice, ses représentants ou gérants ne sauraient jouir et exercer cette faculté;
Qu'il échet de déclarer irrecevable l'action de monsieur BAKALA Raymond;
I) SUR L'INCOMPETENCE MATERIELLE DU PRESENT JUGE
Attendu que monsieur DIABANZOLO Pierre et Madame BAKALA Antoinette ont soulevé in limine litis l'exception d'incompétence rationae materiae du présent juge;
Qu'en la forme, il y a lieu de recevoir cette exception d'incompétence en ce que, conformément aux dispositions de l'article 180 du code de procédure, civile, commerciale, administrative et financière, elle peut être soulevée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir;
Qu'au fond, aux termes de l'article 207 du code de procédure, civile, commerciale, administrative et financière : « Dans tous les cas où il y a urgence, péril en la demeure, ou difficulté sérieuse d'exécution d'un arrêt, d'un jugement ou de tout autre titre exécutoire, le Président de la juridiction compétente, peut ordonner en référé toute mesure provisoire ne préjudiciant pas au fond du litige »;
Qu'il en résulte que le juge des référés ne peut qu'ordonner des mesures conservatoires et de sauvegarde sans préjudicier le fond du litige;
Qu'en l'espèce, l'interdiction d'utiliser le nom commercial Ecole privée Sainte Claire ne constitue pas une mesure conservatoire ou de sauvegarde;
Qu'elle constitue, au contraire, une mesure définitive préjudiciant le fond du litige;
Qu'elle est une question qui ne relève pas du présent juge mais plutôt du juge du fond;
Que dans ces conditions, il y a lieu, de se déclarer incompétent;
II) SUR LES DEPENS
Attendu que selon l'article 217 du code de procédure, civile, commerciale, administrative et financière, le juge de référés peut prononcer condamnation aux dépens;
Qu'aux termes de l'article 57 dudit code, la partie qui succombe est condamnée aux dépens;
Qu'en l'occurrence, monsieur BAKALA Raymond a succombé à l'instance;
Qu'il convient, dès lors, de le condamner aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé commerciale et en premier ressort;
Se déclarons incompétent;
Condamnons monsieur BAKALA Raymond aux dépens.