J-13-204
SOCIETE CIVILE — CAUTIONNEMENT — DIRIGEANT — ASSOCIE — DISPROPORTION — CARACTERE AVERTI DE LA CAUTION
La référence à la qualité d’associé de chacun des époux et de gérant de la société suffit à caractériser l’appréciation différenciée du caractère averti à l’égard de chacune des cautions.
N’est pas manifestement disproportionné au regard de leur patrimoine, le cautionnement d’un dirigeant de société et son épouse associés, propriétaires de deux immeubles, en garantie de prêts destinés à financer l’acquisition d’un immeuble par la société.
Cass. Com. France, 1er février 2011.- Actualités Juridiques, Edition économique n° 3 / 2012, p. 69.
LA COUR
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 9 septembre 2009), que par actes sous seing privé des 30 juillet et 1er août 2003, M. CoLard et son épouse se sont rendus cautions de deux prêts consentis par la Société Générale (la banque) à la SCI Wamm (la SCI), dont ils sont les associés et M. CoLard le gérant, ce dernier étant également gérant de la société CoLard, à laquelle l’immeuble acquis à l’aide des prêts a été loué; qu’en raison de la défaillance de la SCI, la banque a assigné M. et Mme CoLard en exécution de leurs engagements; que ceux-ci ont fait valoir la nullité des actes de caution et la disproportion de leurs engagements, notamment sur le fondement de l’article 1147 du Code civil;
Sur le premier moyen
Attendu que M. et Mme CoLard font grief à l’arrêt, d’avoir rejeté leur demande de dommages-intérêts à l’encontre de la banque et de les avoir condamnés au paiement des sommes de 108.859,69 € et de 633.208,46 €, alors, selon le moyen, que si même les cautions ont la qualité de conjoints, le point de savoir si la caution est ou non avertie doit être apprécié en considérant la personne de chacune des cautions; qu’en se prononçant au cas d’espèce, aux termes de motifs s’appliquant de façon indifférenciée à M. CoLard et à Mme ZARKA, mariés sous le régime de la séparation de biens, les juges du fond ont violé les articles 1137 et 1147 du Code civil;
Mais, attendu que l’arrêt relève que les prêts cautionnés étaient destinés à financer l’acquisition d’un immeuble par la SCI WAMM, composée de M. et Mme CoLard et dirigée par M. CoLard; qu’ainsi, la Cour d’appel qui a fait ressortir la qualité d’associé de la SCI de chacun des époux et la qualité de gérant de la SCI de M. CoLard, n’a pas statué par des motifs indifférenciés à l’égard de chacune des cautions; que le moyen n’est pas fondé;
Sur les deuxième et troisième moyens
Attendu que M. et Mme CoLard font le même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen :
1) que la caution avertie s’entend d’une personne qui a la compétence nécessaire, de par sa formation, et l’expérience requise, de par son activité passée, pour apprécier l’ampleur des engagements souscrits et en mesurer les risques; que la circonstance qu’une caution soit associée au sein de la société qui est débitrice n’est pas de nature à caractériser la qualité de caution avertie; qu’à cet égard, l’arrêt attaqué a été rendu en violation des articles 1137 et 1147 du Code civil;
2) que, de même, la qualité de caution avertie ne saurait être déduite de ce que la caution est l’épouse du dirigeant de la société ayant la qualité de débitrice principale; que, de ce point de vue également, l’arrêt attaqué a été rendu en violation des articles 1137 et 1147 du Code civil;
3) que le seul fait pour la caution d’être copropriétaire indivis de deux immeubles ne peut pas davantage caractériser, à défaut d’autres précisions quant à l’importance de ces immeubles et à leur mode de gestion, la qualité de caution avertie; que l’arrêt attaqué a été de nouveau rendu en violation des articles 1137 et 1147 du Code civil;
4) qu’en tout état de cause, si même les trois circonstances ci-dessus devaient être réunies, de toute façon, la seule qualité d’associée au sein de la société débitrice, même jointe au fait que la caution est le conjoint du dirigeant ou encore, que la caution est copropriétaire indivis de deux immeubles, aucune indication n’étant donnée sur leurs caractéristiques et leurs motivations, ne suffit pas à mettre en évidence la qualité de caution avertie; que sous cet angle également, l’arrêt attaqué doit être censuré pour violation des articles 1137 et 1147 du Code civil;
Mais, attendu qu’ayant relevé que M. et Mme CoLard étaient propriétaires de deux immeubles et que les prêts cautionnés étaient destinés à financer l’acquisition d’un immeuble par la SCI, la Cour d’appel qui a ainsi fait ressortir que, les engagements de caution n’étaient pas manifestement disproportionnés au regard de leur patrimoine, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision;
PAR CES MOTIFS
– Rejette le pourvoi.