J-04-385
CCJA – RECOURS EN CASSATION – INCOMPETENCE D'UNE JURIDICTION NATIONALE DE CASSATION – CONDITION DE SAISINE DE LA CCJA – NECESSITE D’UNE EXCEPTION D’INCOMPETENCE SOULEVEE AU PREALABLE DEVANT LA JURIDICTION NATIONALE – INOBSERVATION – IRRECEVABILITE.
La CCJA ne peut être saisie d'un recours contre une décision rendue par une juridiction nationale statuant en cassation, en application de l'article 18 du traité OHADA, qu'à la condition que l'incompétence de ladite juridiction ait été au préalable soulevée devant celle-ci;! A défaut, le recours doit être déclaré irrecevable.
Article 18 DU TRAITE OHADA
(ARRET N°24 DU 17 JUIN 2004, Affaire : A. C/1- La SOCIETE GENERALE DE BANQUES en COTE D'IVOIRE dite SGBCI 2- Monsieur S. S. Le Juris Ohada, n° 3/2004, juillet-octobre 2004, p. 27, note.- Recueil de jurisprudence de la CCJA, n° 3, janvier-juin 2004, p. 14).
Sur le recours enregistré au greffe de la Cour de céans le 30 mai 2003 et formé par Maître GUEU D. Patrice, Avocat à la Cour à Abidjan y demeurant, Boulevard Latrille, Immeuble Latrille, bâtiment B15, Abidjan Cocody Les Deux Plateaux, 27 BP 179 Abidjan 27, agissant au nom et pour le compte de Monsieur A. , Transporteur domicilié à Abidjan- Adjamé, quartier Fraternité, bâtiment K4, appartement no276, 01 BP 276 Abidjan 01, dans la cause qui l'oppose, d'une part, à la Société Générale de Banques en Côte d'Ivoire dite SGBCI, Société anonyme au capital de 153.333.335.000 F CFA, ayant son siège social à Abidjan - Plateau, 5 et 7 Avenue Joseph ANOMA, 01 BP 1355 Abidjan 01, représentée par Monsieur M., son Administrateur général et ayant, pour conseil Maître SIBAILL y Guy César, Avocat à la Cour à Abidjan, y demeurant, 25 avenue Chardy, ex-immeuble UAP, 04 BP 1155 Abidjan 01 et, d'autre part, à Monsieur S., de nationalité ivoirienne, demeurant à Abidjan-Marcory, boulevard Achalme, villa no06, 09 BP 444 Abidjan 09, ayant pour domicile élu sa propre demeure sise dans ladite ville,
en annulation de l'Arrêt no232/03 rendu le 08 mai 2003 par la Cour Suprême de COTE D'IVOIRE et dont le dispositif est le suivant :
« Rejette le pourvoi formé par A. contre l'Arrêt no926 en date du 28 juin 2000 de la Cour d'appel d'Abidjan;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public;
Ordonne la transcription du présent arrêt sur les registres du greffe de la Cour d'appel d'Abidjan ainsi que sur la minute de !'arrêt entrepris »;
Le requérant invoque à l'appui de son recours le moyen ,unique de cassation tel qu'il figure à la requête annexée au présent arrêt;
Sur le rapport de Monsieur Jacques M'BOSSO, Premier Vice Président;
Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage d l'OHADA;
Sur la recevabilité du recours en annulation
Vu l'article 18 du Traité susvisé;
Attendu que la Société Générale de Banques en Côte d'Ivoire dite SGBCI, défenderesse au pourvoi, dans son mémoire en réponse reçu au greffe de la Cour de céans le septembre 2003 a soulevé in limine litis et à titre principal l'irrecevabilité du recours annulation formé par Monsieur A. au motif que « les articles 15 et 18 du Traité OHADA 0 défini expressément la procédure à suivre pour amener la Cour Commune de Justice d'Arbitrage de l'OHADA à se prononcer; qu'aux' termes de l'article 15 « les pourvois cassation prévus à l'article 14 ci-dessus sont portés devant la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage soit directement par l'une des parties à l'instance, soit sur renvoi d'u juridiction nationale statuant en cassation saisie d'une affaire soulevant des questions relatives à l'application des actes uniformes »; que dans le cas de l'espèce, le pourvoi cassation a été porté par l'une des parties (Monsieur A.) d'abord devant la Cour Suprême de COTE D'IVOIRE; que cette dernière l'a débouté de son recours suivant l'Arrêt no232/ en date du 08 mai 2003; qu'ensuite Monsieur A. a saisi la Cour Commune de Justice d'Arbitrage motif pris de ce que, saisie par lui, la Cour Suprême devait se déclarer incompétente et renvoyer l'affaire devant la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage qu'en ayant cette lecture des dispositions du Traité OHADA relatives aux modes saisine de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage, Monsieur A. en fait une mauvaise interprétation dans la mesure où aux termes de l'article 18 du Traité OHADA, « toute partie qui, après avoir soulevé l'incompétence d'une juridiction nationale statuant en cassation estime que cette juridiction a, dans un litige la concernant, méconnu la compétence de Cour Commune de Justice et d'Arbitrage peut saisir cette dernière dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision contestée.
La Cour se prononce sur sa compétence par arrêt qu'elle notifie tant aux parti qu'à la juridiction en cause;
Si la Cour décide que cette juridiction s'est déclarée compétente à tort, la décision rendue par cette juridiction est réputée nulle et non avenue »; qu'il suit, toujours selon 1es défendeurs, que faute pour Monsieur A. d'avoir soulevé, préalablement à la saisine de Cour Commune de Justice et d'Arbitrage, l'incompétence de la Cour Suprême de CO D'IVOIRE, son recours doit être déclaré irrecevable;
Attendu qu'aux termes de l'article 18 du Traité susvisé, « toute partie qui, après a soulevé l'incompétence d'une juridiction nationale statuant en cassation estime que ce juridiction a, dans un litige la concernant, méconnu la compétence de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage peut saisir cette dernière dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision contestée.
La Cour se prononce sur sa compétence par arrêt qu'elle notifie tant aux part qu'à la juridiction en cause;
Si la Cour décide que cette juridiction s'est déclarée compétente à tort la décis rendue par cette juridiction est réputée nulle et non avenue »;
Attendu qu'il résulte de l'analyse des dispositions de j'article 18 sus énoncées quI Cour de céans ne peut être saisie d'un recours dirigé contre une décision rendue par 1 juridiction nationale statuant en cassation en application de l'article 18 précité qu'~ condition que !'incompétence de ladite juridiction ait été au préalable soulevée devant celle-ci; qu'en l'espèce, tel n'a pas été le cas; qu'il s'ensuit que le recours formé
Monsieur A. au mépris des dispositions de l'article 18 précité doit être déclaré irrecevable
Attendu que Monsieur A. ayant succombé doit être condamné aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Déclare irrecevable le recours en annulation formé par Monsieur A. 'contre l'A no232/03 rendu le 08 mai 2003 par la Cour Suprême de COTE D'lVOIRE;
Condamne Monsieur A. aux dépens. Président M. Seydou BA
Note
Les conditions d'application de l'article 18 du Traité OHADA ont été déjà rappelées par la haute juridiction (Arrêt N°09 du 24 avril 2003, in Le Juris OHADA no2/03, p29 (Ohadata J-03-195).
En effet, le recours en annulation contre une décision rendue par une juridiction nationale incompétente, ne peut être déclaré recevable par la CCJA que si au préalable, le demande( soulevé devant ladite juridiction, l'incompétence dont il se prévaut.
En tout cas, c'est à cette condition que le recours peut être déclaré recevable, pour permettre à la CCJA de statuer au fond.
Cela suppose donc que le demandeur ait soutenu en vain l'incompétence de la juridiction 1ationale statuant en cassation (dans ce sens, Boris Martor et autres, Le droit uniforme africain des affaires issues de l'OHADA, LITEC 2004, n° 53 p.14; Joseph ISSA SAYEGH et Jacqueline LOHOUES. OBLE, OHADA, Harmonisation du droit des affaires, N°454 p189).
C'est ce préalable que rappelle encore, à juste titre, la CCJA.