J-06-07
CCJA – RECOURS EN REVISION – ABSENCE D’ELEMENT NOUVEAU – IRRECEVABILITE DU RECOURS EN REVISION EXERCE SUR LE FONDEMENT DE L’ARTICLE 49 DU REGLEMENT DE PROCEDURE DE LA COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D’ARBITRAGE.
Doit être déclaré irrecevable le recours en révision exercé par la SOTACI contre l’Arrêt n 010/2003 du 19 juin 2003 de la Cour céans, le fait allégué par la requérante au soutien de son recours ne présentant aucun des caractères prévus à l’article 49 du Règlement de procédure pour donner ouverture à la révision de l’arrêt querellé. En effet, pour se prononcer comme elle l’a fait, la Cour de céans s’est limitée et ne pouvait se limiter qu’à l’examen de la mission des arbitres à la lumière de la convention des parties et du dispositif de la sentence arbitrale. Il suit que le document rédigé par Madame LE GARJEAN et relatif à l’évaluation de l’actif net de la STIL au moment de la transaction, document présenté comme constituant le fait nouveau de nature à exercer une influence décisive sur la décision prise, n’était d’aucune utilité pour la détermination de ladite décision. En outre, il n’était ni inconnu de la demanderesse puisqu’il avait pour but de confirmer une situation provisoire établie sur papier manuscrit depuis 1997 dont SOTACI était en possession et qu’elle avait notamment mentionné dans sa note de plaidoirie du 30 mars 2000 devant le Tribunal arbitral et dans ses écritures du 20 octobre 2000 devant la Cour d’appel, ni de la Cour de céans qui l’avait au nombre des pièces du dossier de la procédure ayant abouti à l’Arrêt n 10/2003 du 19 juin 2003 dont la révision est demandée.
Article 49 REGLEMENT DE PROCEDURE DE LA CCJA
CCCJA, arrêt n 38 du 2 juin 2005, Société des tubes d’acier et d’aluminium dite SOTACI c/ Delpech Gérard et Delpech Joëlle, Recueil de jurisprudence de la CCJA, n 5, janvier juin 2005, volume 1, p. 25; Le Juris-Ohada, n 4/2005, juillet- septembre 2005, p. 19.
Pourvoi : n 82/2003/PC du 30 septembre 2003.
Affaire : Société des Tubes d’Acier et d’Aluminium dite SOTACI.
(Conseils : Maîtres Théodore HOEGAH et Michel ETTE, Avocats à la Cour).
Contre.
1) Monsieur DELPECH Gérard.
2) Madame DELPECH Joëlle.
(Conseils : SCPA AHOUSSOU KONAN &Associés, Avocats à la Cour).
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A,), Première chambre, de l’Organisation p~~ l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A)a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 2 juin 2005 où étaient présents :
– Messieurs Jacques M’BOSSO, Président;
– Maïnassara MAIDAGI, Juge rapporteur;
– Biquezil N AMBAK, Juge;
– et Maître KEHl Colombe BINDE, Greffier.
Sur le recours enregistré au greffe de la Cour de céans sous le no082/2003/PC du 30 septembre 2003 et formé par Maîtres Théodore HOEGAH & Michel ETTE, Avocats Associés à la Cour, demeurant ruea7 Pierre Sémar, villa NA2! 01BP 4053 Abidjan 01, agissant au nom et pour le compte de la SOTACI dans une cause l’opposant aux époux DELPECH, ayant pour conseils la SCPAAHOUSSOU, KONAN &Associés, Avocats à la Cour demeurant 19, Boulevard Angoulevant, Résidence « Neuilly », 1er étage, aile gauche, 01BP l366Abidjan 0l, en révision de l’Arrêt n l0/2003 rendu le 19 juin 2003 par la Cour de céans dont le dispositif est le suivant.–
« Statuant publiquement, après en avoir délibéré.
Casse l’Arrêt n 456 du 27avri12001rendu par la Cour d’appel d’Abidjan.
Évoquant et statuant à nouveau.
Déclare recevable, en la forme, le recours en annulation formé par la SOTACI.
Rejette le recours en annulation de la sentence arbitrale n CACI/02/ARB/99 en date du 27 avril 2000.
Dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande de la SOTACI tendant à1a condamnation des époux DELPECH au paiement d’un trop perçu de francs CFA 63.984.181.
Condamne la SOTACI aux dépens ».
Sur le rapport de Monsieur le Juge Maïnassara MAÏDAGI
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique.
Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de L’OHADA ».
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure qu’aux termes d’une « convention de cession de titres » conclue à Abidjan le 16 février 1998, les actionnaires de la Société de Transformation Industrielle de Lomé dite STIL, société de droit togolais dont le siège est à Lomé, tous représentés par Monsieur et Madame G. DELPECH, avaient cédé à la SOTACI la totalité des actions composant le capital social de la STIL; que le prix global de cession des actions avait été arrêté à la somme de huit millions cinq cent mille (8 500 000) francs français soit huit cent cinquante millions (850 000 000) de francs CFA; que les parties à la convention avaient décidé de déduire de ce montant le passif net de la société provisoirement évalué à trois millions (3 000 000) de francs français, soit trois cent millions (300 000 000) de francs CFA de sorte que le prix net d’acquisition des actions s’était élevé à la somme de cinq millions cinq cent mille (5 500 000) francs français soit cinq cent cinquante millions (550 000 000) de francs CFA; que tenant compte du caractère provisoire de l’évaluation du passif net au moment de la signature de la convention, l’article 3.1de ladite convention stipulait que » le prix net, ainsi que par voie de conséquence, les échéances stipulées sont susceptibles de variation en fonction de la situation réelle du passif au 28 février 1998 et qu’encas de variation du passif, celle-ci modifiera en priorité les échéances les plus éloignées »; une fois la somme de cinq cent cinquante millions (550 000 000) de francs CFA acquittée, les époux DELPECH avaient estimé que la SOTACI restait leur devoir encore la somme de cent millions deux cent neuf mille cent quatre-vingt-neuf(100.209.l89) francs CFAcar, selon eux, le passif net de la STIL, tel qu’il apparaissait au bilan établi le 28 février 1998 par le cabinet Afrique Audit et Consulting, s’élèverait à la somme de cent quatre vingt dix neuf millions sept cent quatre-vingt dix mille huit cent onze (199 790 811) francs CFA et qu’il conviendrait de déduire ce montant du passif net provisoirement arrêté au moment de la signature de la convention de cession à la somme de trois cent millions (300 000 000) de francs CFA.
Attendu qu’après plusieurs rencontres infructueuses à l’effet de trouver une solution amiable à leur différend, les époux DELPECH avaient saisi la Chambre d’Arbitrage de Côte d’Ivoire dite CACI d’une demande d’arbitrage aux fins de voir condamner la SOTACI à leur payer la somme de cent millions deux cent neuf mille cent quatre-vingt-neuf(l00.209.189) F CFA à titre de complément de prix ainsi que des dommages et intérêts pour résistance abusive; que la SOTACI avait, pour sa part, sollicité à titre reconventionnel la condamnation des époux DELPECH à lui payer la somme principale de soixante trois millions neuf cent quatre vingt quatre mille cent quatre-vingt et un (63.984.181) francs CFA en application des dispositions de l’article 3.1de la convention de cession de titres en raison de l’alourdissement du passif net qui s’établissait à trois cent soixante trois millions neuf cent quatre vingt quatre mille cent quatre vingt et un (363.984.181) francs CFA et non à trois cent millions (300 000 000) de francs CFA comme estimé dans la convention de cession du 16 février 1998.
Attendu que par la Sentence arbitrale no CACI/O2/ ARB/99 en date du 27 avril 2000, le tribunal arbitral a fait droit à la demande des époux DELPECH en condamnant la SOTACI à :
– 100 209 189 F CFA au titre de complément de prix de cession des actions de la Société STIL;
– 8 603 616 F CFA au titre des intérêts de retard conventionnels;
– 6 393 616F CFA au titre de frais de procédure.
Attendu que sur le recours en annulation formé par la SOTACI contre la sentence arbitrale sus indiquée au motif que les arbitres n’auraient pas respecté leur mission, la Cour d’appel d’Abidjan a rendu le 24 avril 2001l’Arrêt n 456 qui a notamment reçu la SOTACI en sa procédure en annulation, l’y a dit partiellement fondée, et a annulé la sentence dont s’agit motif pris de ce que » manifestement les arbitres ne se sont pas conformés à leur mission en application de l’article 26 de l’Acte uniforme [relatif au droit de l’arbitrage] précité, leur sentence encourt l’annulation »; que sur pourvoi en cassation formé le 28 mars 2002 parles époux DELPECH et dirigé contre ledit arrêt de la Cour d’appel d’Abidjan, la Cour de céans a rendu le 19 juin 2003, l’Arrêt n 10/2003 dont recours en révision.
Sur la recevabilité du recours en révision
1) Vu l’article 49 du Règlement de procédure susvisé.
Attendu que les défendeurs au présent recours en révision, les époux DELPECH ont, dans leur mémoire responsif reçu au greffe de 1a Cour de céans le 10 mars 2004, soulevé in limine litis, l’irrecevabilité dudit recours motif pris de ce que les trois conditions cumulatives prévues à l’article 49 du Règlement de procédure susvisé ne seraient pas réunies en l’espèce; que l’arrêt invoqué n’aurait eu aucun caractère déterminant sur le résultat de l’instance; que ledit fait invoqué ne serait inconnu ni de la partie qui l’invoque au soutien de son recours en révision, ni de la Cour de céans au moment du prononcé de son arrêt; qu’en conséquence, il y a lieu, selon les époux DELPECH, de déclarer irrecevable le présent recours en révision qui n’obéit pas aux prescriptions de l’article 49 du Règlement de procédure susvisé.
Attendu qu’aux termes de l’article 49 du Règlement susvisé, « 1 La révision de l’arrêt ne peut être demandée à la Cour qu’en raison de la découverte d’un fait de nature à exercer une influence décisive et qui, avant le prononcé de l’arrêt, était inconnu de la Cour et de la partie qui demande la révision.
2) La procédure de révision s’ouvre par un arrêt de la Cour constatant expressément l’existence d’un fait nouveau lui reconnaissant les caractères qui donnent ouverture à la révision et déclarant la demande recevable.
Attendu, en l’espèce, que l’Arrêt n 10/2003 du 19 juin 2003 dont la révision est demandée a eu à trancher, après cassation de l’arrêt de la Cour d’appel d’Abidjan, l’unique point de contestation portant sur le respect ou non par les arbitres de leur mission et la validité conséquente de la sentence qu’ils ont rendue; que sur ce point de droit, la Cour de céans a, après l’examen de leur mission au regard de la convention des parties et du dispositif de la sentence arbitrale qu’ils ont rendue, conclu que » les arbitres, qui s’étaient fondés sur des solutions légales pour régler le différend qui oppose la SOTACI et les époux DELPECH et qui n’avaient pas l’obligation, comme le soutient la SOTACI, de statuer uniquement en amiable compositeur, sont restés dans le cadre de la mission qui leur est confiée »; que pour ce motif, la Cour de céans a rejeté le recours en annulation de la sentence arbitrale.
Attendu que pour se prononcer comme elle l’a fait, la Cour de céans s’est limitée et ne pouvait se limiter qu’à l’examen de la mission des arbitres à la lumière de la convention des parties et du dispositif de la sentence arbitrale; qu’il suit que le document rédigé par Madame LE GARJEAN et relatif à l’évaluation de l’actif net de la STIL au moment de la transaction, document présenté comme constituant le fait nouveau de nature à exercer une influence décisive sur la décision prise, n’était d’aucune utilité pour la détermination de ladite décision; qu’en outre, il n’était ni inconnu de la demanderesse puisqu’i1avait pour but de confirmer une situation provisoire établie sur papier manuscrit depuis 1997 dont la SOTACI était en possession et qu’elle avait notamment mentionné dans sa note de plaidoirie du 30 mars 2000 devant le Tribunal arbitral et dans ses écritures du 20 octobre 2000 devant la Cour d’appel, ni de la Cour de céans qui l’avait au nombre des pièces du dossier de la procédure ayant abouti à l’Arrêt n 010/2003 dont la révision est demandée.
Attendu que de tout ce qui précède, il y a lieu de constater que le fait allégué par la requérante au soutien de son recours en révision ne présente aucun des caractères prévus à l’article 49 sus énoncé du Règlement de procédure susvisé pour donner ouverture à la révision de l’arrêt querellé et qu’il échet en conséquence de déclarer irrecevable ledit recours en révision.
Attendu que la SOTACI ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré.
Déclare irrecevable le recours en révision exercé par la SOTACI.
La condamne aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessous et ont signé.
– le Greffier;
– le Président.