J-06-27
CCJA – COMPETENCE –APPLICATION OU INTERPRETATION DU DROIT UNIFORME DANS La cause EXAMINEE PAR LES JUGES DU FOND (NON).
INCOMPETENCE DE LA CCJA.
Il est constant comme résultant de l’examen des pièces du dossier de la procédure, que le Jugement n 532 du 20 novembre 1997 du Tribunal de Première Instance de Cotonou, tout. comme l’Arrêt n l74 du 28 juin 2001, objet du présent pourvoi, ne sont fondés sur aucun. Acte uniforme ou règlement prévu au Traité institutif de l’OHADA. En effet, aucun grief, ni. moyen tiré de la violation ou de l’erreur dans l’application ou l’interprétation d’un Acte.uniforme ou règlement prévu au Traité OHADA, n’a été invoqué ni devant le premier juge, ni. devant le juge d’Appel, par l’une ou l’autre des parties. L’évocation par le requérant, des. articles 36 et 154 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de. recouvrement et des voies d’exécution dans l’argumentaire accompagnant l’exposé de son. moyen de cassation, ne saurait changer ni le sens, ni la motivation de l’arrêt attaqué, lequel a. tranché sur la validité de l’acte notarié du 14 avril 2000, par lequel la société Négoce &. Distribution a remis sa dette à la Continental Bank, et sur la procédure par laquelle la même. société entendait se faire payer sa créance.
Article 14 DU TRAITE OHADA
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.), ARRET N 046/2005 du 07 juillet 2005, Affaire Établissements SOULES & Cie (Conseil Maître Robert DOSSOU, Avocat à la Cour) contre Société NEGOCE & DISTRIBUTION dite N & D CONTINENTAL BANK BENIN (ex Crédit Lyonnais Bénin) (Conseil : Maître Maximin E.caKPO-ASSOGBA, Avocat à la Cour), Recueil de jurisprudence de la CCJA, n 6, juin- décembre 2005, p. 8. Le Juris Ohada, n 1/2006, p. 16.
Pourvoi : n 034/2004/PC du 15 mars 2004.
LA COUR
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.), Première Chambre, de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A),a rendu l’Arrêt suivant, en son audience publique du 07 juillet 2005, où étaient présents :
– Messieurs Jacques M’BOSSO, Président;
– Maïnassara MAIDAGI, Juge;
– Biquezil NAMBAK, Juge, rapporteur;
– Et Maître KEHI Colombe BINDE, Greffier.
Sur le renvoi, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique, devant la Cour de céans, de l’affaire Établissements SOULES & Cie contre Société NEGOCE & DISTRIBUTION dite N & D et CONTINENTAL BANK BENIN, par Arrêt du 18 avril 2003 de la Cour Suprême du Bénin, Chambre Judiciaire, saisie d’un pourvoi initié le 07 août 2002 par Maître Robert M. DOSSOU, Avocat à la Cour, demeurant 17, Boulevard St Michel 01BP 3407 Cotonou (Bénin), agissant au nom et pour le compte des Établissements SOULES & Cie, renvoi enregistré sous le n 034/2004/PC du 15 mars 2004.
En cassation de l’Arrêt n 175 rendu le 28 juin 2001par la Cour d’Appel de Cotonou, et dont le dispositif est le suivant
« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale, en appel et en dernier ressort.
EN LA FORME
déclare la Société Négoce & Distribution et la Continental Bank recevables en leurs appels respectifs.
Au fond
confirme la jonction des procédures 017/98 et 066/98.
dit que l’acte notarié en date du 14 avril 2000, par lequel la Société Négoce & Distribution a remis sa dette à la Continental Bank Bénin, constitue un désistement d’action.
dit que ledit désistement d’action rend sans objet la procédure par laquelle la Société Négoce & Distribution entendait se faire payer sa créance.
condamne la Société Négoce & Distribution aux dépens ».
Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation tels qu’ils figurent au mémoire ampliatif du 07 août 2002 annexé au présent arrêt.
Sur le rapport de Monsieur le Juge Biquezil NAMBAK
Vu les dispositions des articles 13, 14 et 15 du Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique.
Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA.
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure, que depuis 1986, les Établissements SOULES & Cie entretenaient des relations commerciales avec la Société Négoce & Distribution dite N & D; que les demandes d’ouverture de trois crédits documentaires introduites le 28 décembre 1993, n’auraient été exécutées et notifiées aux bénéficiaires, les Établissements SOULES & Cie, que les 12 et 13 janvier 1994; que la dévaluation du franc CFA intervenue le 11janvier 1994, avait eu pour conséquence, le doublement de tous les paiements qui devaient être effectués en francs français; qu’estimant que le Crédit Lyonnais Bénin n’avait pas fait preuve de diligence dans la mise en place et la notification des crédits documentaires, la Société Négoce & Distribution avait assigné ce dernier le 26 juillet 1994 devant le Tribunal de Première Instance de Cotonou, aux fins de constater, d’une part, l’ouverture tardive des crédits au 10 janvier 1994, et d’autre part, de dire et juger que le Crédit Lyonnais Bénin était mal venu à débiter les comptes de la Société N & D de 164 464 477 FCFA au lieu de 89 000 000 FCFA, selon la parité arrêtée d’un commun accord le 30 novembre 1993, de 1FCFA égale 0,02 FF; que par lettre en date du 26 septembre 1995, la Société Négoce & Distribution informait le Crédit Lyonnais Bénin de ce qu’elle cédait aux Établissements SOULES & Cie, à titre irrévocable, « toutes sommes en principal et accessoires auxquelles » il serait condamné; que sur la base de la créance qu’ils détenaient sur la Société Négoce & Distribution et de cette cession, les Établissements SOULES & Cie s’étaient portés intervenants volontaires dans la procédure initiée contre le Crédit Lyonnais Bénin; que statuant tant sur la demande principale que sur celle formulée par voie d’intervention, le Tribunal de Première Instance de Cotonou avait, par Jugement n 532 du 20 novembre 1997, notamment renvoyé les Établissements SOULES & Cie à mieux se pourvoir et condamné le Crédit Lyonnais à payer à la Société Négoce & Distribution, les sommes de 75.46.477 FCFA et 275.812 FCFA aux titres de frais indûment perçus et des intérêts au taux légal, pour compter du 16 janvier 1994, date de l’assignation; que la Société Négoce & Distribution et la Continental Bank Bénin avaient respectivement relevé appel les 08 et 13 janvier 1998, et décision par conclusions du 25 avril 2000; que le 14 avril 2000, par acte notarié, la Société Négoce & Distribution avait consenti « une remise de dette » au profit de la Continental Bank Bénin; que la Cour d’Appel de Cotonou avait, par Arrêt n 174 du 28 juin 2001, indiqué que l’acte notarié en date du 14 avril 2000 par lequel la Société Négoce & Distribution avait remis sa dette à la Continental Bank Bénin, constituait un désistement d’action, et qu’en conséquence, la procédure par laquelle la Société Négoce & Distribution entendait se faire payer sa créance, devenait sans objet; que les Établissements SOULES & Cie avaient formé pourvoi en cassation contre l’arrêt précité, devant la Cour Suprême du Bénin; que cette dernière, ayant estimé que l’affaire soulève des questions relatives à l’application des Actes uniformes, s’est déclarée incompétente et s’est dessaisie du dossier au profit de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA, par Arrêt du 18 avril 2003.
Sur la compétence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage
Vu l’article 14, alinéas 3 et 4 du Traité susvisé.
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les articles 36 et 154 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, « les règles gouvernant les jugements » et le principe d’inopposabilité de l’acte frauduleux, en ce que la saisie attribution qui a eu lieu le 13 janvier 2000a été dénoncée le 14 janvier 2000, alors que la prétendue « remise de dette » à laquelle l’arrêt querellé a, à tort, accordé effet est intervenue le 24 avril 2000, soit trois mois et onze jours après ladite saisie; que le Jugement n 531du 20 novembre 1997, assorti de l’exécution provisoire et dont l’exécution était entreprise, avait condamné « le Crédit Lyonnais Bénin à effectuer le transfert, en payant aux Établissements SOULES & Cie, la somme de 255 000 000 FCFA et à débiter le compte de la Société Négoce & Distribution de la somme de 127.500 000 FCFA, selon l’ancienne parité », alors que la Continental Bank Bénin prétend, quatre ans après ledit jugement, bénéficier non pas de la part des Établissements SOULES & Cie, mais de celle de la société Négoce & Distribution, d’une prétendue remise de dette; que dès le prononcé du Jugement n 531, la Société Négoce & Distribution a perdu, ne serait-ce que provisoirement, tout droit sur cette somme, et ne peut plus en disposer; que le prétendu acte notarié de cession du 14 avril 2000 revêt toutes les apparences d’un acte régulier, mais constitue à l’évidence, un acte délibérément fait en fraude des droits des Établissements SOULES & Cie, alors qu’une telle « fraude vêtue » est sanctionnée par son inopposabilité aux tiers, donc par l’inefficacité; que de ces chefs, l’Arrêt n 174/2001du 28 juin2001appelle cassation.
Attendu, en l’espèce, qu’il est constant comme résultant de l’examen des pièces du dossier de la procédure, que le Jugement n 5321du 20 novembre 1997 du Tribunal de Première Instance de Cotonou, tout comme l’Arrêt n 175 du 28 juin 2001, objet du présent pourvoi, ne sont fondés sur aucun Acte uniforme ou règlement prévu au Traité institutif de l’OHADA; qu’en effet, aucun grief ni moyen tiré de la violation ou de l’erreur dans l’application ou l’interprétation d’un Acte uniforme ou règlement prévu au Traité de l’OHADA n’a été invoqué ni devant le premier juge, ni devant le juge d’Appel, par l’une ou l’autre des parties; que l’évocation par le requérant, des articles 36 et 154 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, dans l’argumentaire accompagnant l’exposé de son moyen de cassation, ne saurait changer ni le sens, ni la motivation de l’arrêt attaqué, lequel a dit que l’acte notarié du 14 avril 2000 constitue un désistement d’action et a conclu que ledit désistement rend sans objet la procédure par laquelle la Société N & D entendait se faire payer sa créance; qu’il s’ensuit que les conditions de compétence de la Cour de céans, telles que précisées par l’article 14 sus-énoncé du Traité susvisé, ne sont pas réunies et qu’il échet en conséquence, nonobstant l’arrêt d’incompétence de la Cour Suprême du Bénin, qui ne lie pas la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, de se déclarer incompétente et de renvoyer l’affaire devant ladite juridiction, pour qu’il y soit statué.
Attendu qu’il y a lieu, en l’état, de réserver les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré :
se déclare incompétente.
renvoie l’affaire devant la Cour Suprême du Bénin.
réserve les dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
– le Président;
– le Greffier.