J-09-240
VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE ATTRIBUTION DE CREANCE – ARRET – REQUETE AUX FINS DE DEFENSE A EXECUTION – EFFET SUSPENSIF (OUI) – EXECUTION DE L’ORDONNANCE DE SAISIE (NON) – MAINLEVEE DE LA SAISIE – ANNULATION DE LA SAISIE ATTRIBUTION (OUI).
La requête aux fins de défense à exécution a un effet suspensif immédiat de l’exécution de la décision ordonnant une saisie attribution de créance. La mainlevée de toute saisie pratiquée au mépris de cette exigence légale doit être prononcée et l’ordonnance l’autorisant encourt annulation.
(COUR D’APPEL DU CENTRE, Arrêt N 382/CIV/06-07 du 08 Juin 2007, La Banque Internationale du Cameroun pour l’Épargne et le Crédit (BICEC) contre Eric SUNDJIO).
LA COUR
Vu l’ordonnance N 25 rendue le 13 Octobre 2005 par le Tribunal de Première Instance de Yaoundé Centre Administratif.
Vu l’arrêt avant dire droit N 84/ADD/CIV rendu le 08 Décembre 2006 par la Cour d’Appel de céans dans la présente cause.
Vu les pièces des dossiers des procédures.
Ouï les parties en leurs conclusions respectives.
Ouï madame la présidente en son rapport.
Après en avoir délibéré conformément à la loi et en collégialité.
EN LA FORME
Considérant que toutes les parties ont été représentées par leurs conseils et ont conclu.
Qu’il échet de statuer contradictoirement à l’égard de toutes; que par ailleurs il échet de tirer les conséquences de droit de l’arrêt avant dire droit qui a déjà déclaré les deux appels recevables.
AU FOND
Considérant que par ordonnance N 25 du 13 octobre 2005, le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé Centre Administratif statuant en matière du contentieux de l’exécution, conformément au dispositif repris supra, a rejeté les contestations de la BICEC comme non fondées, déclaré irrecevable la demande de paiement des causes de la saisie attribution présentée par Eric SUNDJIO.
Considérant que le Docteur Eric SUNDJIO, conclut sous la plume de son conseil, Maître Deborah ESSOH EWANE à la confirmation partielle de l’ordonnance appelée en ce qu’elle rejette toutes les contestations élevées par la BICEC comme non fondées et la condamne aux entiers dépens et à son infirmation en ce qu’elle déclare Eric SUNDJIO irrecevable à percevoir les sommes saisies.
Qu’il sollicite de la Cour de céans, qu’évoquant et statuant à nouveau qu’elle ordonne que lui soit payées à lui SUNDJIO toutes les sommes ainsi saisies sous astreinte de 1 000 000 FCFA par jour de retard à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir; qu’il fait valoir au soutien de son appel partiel que c’est à juste titre que le premier juge a rejeté les contestations élevées par la BICEC pour invalider la saisie querellée, celles-ci étant dilatoires et fantaisistes; que c’est bel et bien l’arrêt N 45/CIV du 22 octobre 2004 ayant infirmé le jugement N 14/CIV du 21 novembre 2002 qui est en train d’être exécuté et rien d’autre, lesdites décisions étant d’ailleurs visées dans le procès-verbal querellé.
Que c’est fantaisiste pour la BICEC de prétendre que les dispositifs desdites décisions ne renferment pas le montant de la créance à recouvrer pèchent par une omission constitutive du défaut de titre exécutoire au sens de l’article 153 de l’Acte Uniforme N 6.
Que de même contrairement aux allégations de la BICEC l’arrêt N 43/CIV du 22 octobre 2004 constitue un « titre exécutoire » au sens de l’article 153 sus-visé son exécution ayant bel et bien été rendue en premier et dernier ressort, le pourvoi, unique moyen de recours possible n’étant pas suspensif d’exécution.
Qu’ainsi tant la saisine du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi que celle de la Cour Suprême, par la BICEC, ne peuvent être considérées comme contestation valable et doivent être simplement écartées des débats car faites en violation des règles de compétence d’attribution d’ordre public, la matière relevant de la seule compétence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage.
Que dès lors le « pourvoi en cassation » et « la requête aux fins de suspension d’exécution » exercés par la BICEC devant la Cour Suprême Nationale sont inopérants en l’état, la juridiction sus-visée ne pouvant en aucun cas être admise à statuer sur une demande de sursis à exécution accessoire à un pourvoi qu’elle n’est pas habilitée à connaître.
Qu’il échet de déduire, contrairement aux allégations de la BICEC qu’il n’y a en l’état aucune contestation contre le titre exécutoire qu’est l’arrêt N 43 sus-visé; que de même ce n’est pas l’ordonnance N 100 du 06 juin 2001 vainement querellée que l’on exécute d’où l’inutilité d’invoquer le « faux recours » exercé contre elle; qu’enfin les voies d’exécution étant régies par les Actes Uniformes c’est à tort que la BICEC relève la violation des dispositions de l’accord de siège de la BEAC du 30 mars 2004 inapplicable en l’espèce.
Considérant que s’agissant du motif de l’appel partiel, continue Eric SUNDJIO, il s’appuie sur le chef d’irrecevabilité fantaisiste décidé par le premier juge destiné à enterrer ce dossier et à empêcher éternellement le concluant de rentrer en possession de ses fonds.
Qu’en effet, cette irrecevabilité « surgie de nulle part est un véritable non sens judiciaire »; que le premier juge devait plutôt ordonner le paiement des sommes après le rejet des contestations au lieu d’une irrecevabilité contraire à l’esprit et à la lettre tant du jugement que de la loi.
Considérant que la Banque Internationale du Cameroun pour l’Épargne et le Crédit en abrégé BICEC, conclut sous la plume de son conseil Maître Guy NOAH avocat, d’une part à l’infirmation de l’ordonnance appelée en ce qu’elle a rejeté ses contestations et sollicité l’annulation subséquente de la saisie attribution pratiquée le 23 juin 2005 entre les mains de la BEAC et la mainlevée de ladite saisie et, d’autre part à la confirmation de l’irrecevabilité d’Eric SUNDJIO à percevoir les sommes résultant de la saisie.
Qu’elle argue au soutien de son action que tant l’arrêt N 43/CIV du 22 octobre 2004 que le jugement N 14 du 21 Novembre 2002 ne constituent un titre exécutoire en ce qu’ils ne constatent aucune créance liquide et exigible au profit d’Eric SUNDJIO au sens de l’article 153 de l’Acte Uniforme N 6; qu’en plus l’arrêt 43/CIV du 22 Octobre 2004 déféré à la Cour Suprême du Cameroun par un pourvoi et une requête aux fins de défense à exécution n’a pas le caractère exécutoire exigé par l’article 153 précité.
Que la motivation du premier juge à cet effet est critiquable, la loi N 92/008 du 14 Août 1992 fixant certaines dispositions relatives à l’exécution des décisions de justice faisant partie intégrante du droit positif camerounais et s’appliquant à toutes les décisions.
Qu’au surplus la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage reconnaît au juge national la compétence de suspendre l’exécution d’une décision si celle-ci n’est pas engagée comme en l’espèce –Arrêt N 013/2003 du 19 juin 2003 CCJA.
Que par ailleurs, même l’ordonnance N 100 du 6 juin 2001 fondant la saisie attribution faisant l’objet d’un recours de la BICEC devant le Tribunal de Grande Instance de Mfoundi n’a pas le caractère exécutoire exigé par l’article 153 de l’Acte Uniforme N 6.
Considérant qu’il résulte de manière constante des débats que l’arrêt confirmatif N 43/CIV rendu le 22 octobre 2004 par la Cour d’Appel de céans est véritablement le titre en vertu duquel la saisie attribution du 23 juin 2005 querellée a été pratiquée.
Que de même, les débats portent pour l’essentiel sur le caractère exécutoire et non du titre en question et accessoirement sur l’absence de l’indication du montant à recouvrer.
Considérant que selon l’article 153 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations.
Que, pour retenir l’efficacité des titres mis en exécution, le premier juge décide que la requête aux fins de sursis à exécution de la BICEC contraires à l’article 16 du Traité OHADA ne saurait produire l’effet suspensif motif pris de ce que le pourvoi a été formé devant une juridiction incompétente s’agissant d’une affaire soulevant des questions relatives à l’application des actes uniformes.
Considérant cependant qu’il demeure constant tant pour la doctrine, la jurisprudence et la loi, que si le pourvoi ne suspend pas l’exécution d’un arrêt, la requête aux fins de défense a un effet suspensif immédiat de l’exécution.
Qu’à cet effet, la loi N 92/008 du 14 Août 1992 modifiée fixant certaines dispositions relatives à l’exécution des décisions de justice, dispose en son article 5 alinéa 1 « la partie qui succombe en appel ou devant une juridiction statuant en premier et en dernier ressort et qui a formé pourvoi devant la Cour Suprême peut par simple requête au Président de ladite Cour, faire suspendre l’exécution de la décision attaquée » qu’étant donné que le juge inférieur n’est pas compétent pour apprécier et, a fortiori préjuger de la décision de la juridiction supérieure de recours, c’est à mauvais droit que le premier juge a préjugé de l’incompétence de la Cour Suprême et considéré la requête aux fins de défense introduite devant ladite Cour comme sans effet; qu’en effet, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage outre qu’elle reconnaît déjà la pertinence de la loi N 92/008 sus visée, admet la compétence pour le juge national d’empêcher l’exécution d’une décision assortie de l’exécution provisoire : CCJA, Arrêt N 013/2003 du 19 juin 2003.
Considérant qu’il résulte des pièces du dossier que la BICEC a notifié au Docteur Eric SUNDJIO le certificat du dépôt et la requête aux fins de sursis à l’exécution de l’arrêt précité le 02 février 2005 et qu’en dépit de ladite notification, Eric SUNDJIO a fait pratiquer la saisie querellée le 23 Juin 2005.
Que se faisant, au moment où la saisie se pratiquait, l’arrêt N 43 du 22 octobre 2004 susvisé n’avait plus les conditions d’efficacité exigées par l’article 153 de l’acte uniforme susvisé.
Qu’il échet dès lors, soit qu’il soit besoin de s’appesantir sur les autres griefs formulés à l’encontre de la saisie pratiquée de dire telle saisie attribution de créance pratiquée le 23 juin 2005 par exploit de Maître NGONGANG IME gravement viciée, de l’annuler en conséquence et d’en ordonner main levée.
Considérant que de ce qu’il suit, la demande du Docteur Eric SUNDJIO en paiement des sommes réclamées ci- dessus s’avère non fondée; qu’il convient dès lors de l’en débouter.
Considérant qu’il y a lieu de condamner la partie qui succombe aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de toutes les parties, en matière de référé, en appel et en dernier ressort.
EN LA FORME
Vu l’arrêt N 84/ADD/CIV du 08 décembre 2006 recevant les appels et ordonnant la jonction des procédures.
AU FOND
Infirme l’ordonnance entreprise.
Statuant à nouveau.
Annule la saisie attribution de créance pratiquée le 23 Juin 2005 par exploit de Maître NGONGANG SIME à la BEAC au préjudice de la BICEC.
Ordonne en conséquence la main levée de ladite saisie.
Déboute Eric SUNDJIO de sa demande comme non fondée.