J-09-286
CCJA – COMPETENCE – CONDITIONS – LITIGE SURVENU DANS LE DOMAINE DU DROIT MARITIME – ABSENCE D’ACTE UNIFORME RELATIF AU CONTRAT DE TRANSPORT DE MARCHANDISES PAR MER – ABSENCE NE PERMETTANT PAS A LA CCJA D’EXAMINER L’AFFAIRE RELEVANT DES DISPOSITIONS NATIONALES – INCOMPETENCE.
La CCJA doit se déclarer d’office incompétente et renvoyer l’affaire à la Cour suprême de Côte d’ivoire, dès lors que les conditions de sa compétence ne sont pas réunies.
Il en est ainsi lorsque le litige survient dans le domaine du droit maritime, en l’occurrence, le transport par mer du sel iodé et que l’absence d’Acte uniforme relatif au contrat de transport de marchandises par mer ne permet pas à la CCJA d’examiner cette affaire qui relève des dispositions nationales.
C.C.J.A. 2ème Chambre, arrêt n 013 du 26 février 2009, affaire : Société E c/ Madame D, Juris Ohada, n 2/2009, avril-juin, p. 33.
Sur le renvoi, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, devant la Cour de céans de l’affaire Société EKA Benya contre Madame D, par Arrêt N 408/07 du 05 juillet 2007 de la Cour Suprême de Côte d’ivoire, Chambre judiciaire, formation civile, saisie d’un pourvoi formé le 02 novembre 2006 par la Société d’Avocats Moïse-Bazié Koyo et Assa Akoh, Avocats à la Cour, demeurant à Abidjan 8, vieux Cocody, Rue B15, (Ruelle clinique GOC1), 08 BP 2614 Abidjan 08, agissant au nom et pour le compte de la société EKA Benya, Société anonyme dont le siège social est sis à Abidjan 14, Rue des pécheurs, Zone 3 TF 1497, 05 BP 1659 Abidjan 05, dans la cause qui l’oppose à Madame D, commerçante, demeurant à Abidjan Yopougon et ayant pour conseil Maître Coulibaly Soungalo, Avocat à la Cour d’appel d’Abidjan, y demeurant 21, Boulevard Roume, immeuble TF, 35825 Jane, 1er étage, près du Parquet Général de la Cour Suprême, 04 BP 2192 Abidjan 04.
En cassation de l’Arrêt N 381 rendu le 31 mars 2006 par la Cour d’appel d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant :
– « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort.
Rejette le moyen tiré de l’autorité de la chose jugée.
Rejette l’exception de prescription soulevée par l’intimée.
Reçoit dame D en son appel.
L’y dit particulièrement fondée.
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau.
Condamne la Société EKA Benya à payer à dame D la somme de dix millions de francs (10 000 000 F) toutes causes confondues.
Condamne l’intimée aux dépens ».
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les trois moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent Arrêt.
Sur le rapport de Monsieur le Juge Doumssinrinmbaye BAHDJE
Vu les dispositions des articles 13, 14 et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique.
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA.
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que Madame D, commerçante, a acheté à Dakar 210 tonnes de sel iodé d’une valeur de 3.990 000 (trois millions neuf cent quatre-vingt dix mille) Francs CFA, marchandise dont la Société EKA Benya, tantôt commissionnaire de transport, tantôt consignataire de navire chargé d’en assurer le transport, devait faire procéder aux opérations de déchargement au port d’Abidjan; qu’alors qu’elle attendait l’arrivée de sa cargaison de sel, Madame DJE Lou Djénan Antoinette a reçu un courrier du 18 octobre 1999 de la société EKA Benya l’informant que le navire MN ECOWAS TRADER il transportant la marchandise a coulé le 15 octobre 1999; qu’à cette occasion, la Société EKA Benya invitait la défenderesse au pourvoi à prendre ses dispositions pour se faire indemniser par son assureur; que pour obtenir réparation du préjudice subi, Madame D saisissait le Tribunal de première instance d’Abidjan qui la déboutait de ses prétentions et mettait hors de cause le Capitaine commandant le navire M/V ECOWAS TRADER il, pris en qualité de représentant de l’Armateur, par Jugement n 1128/C1V3 du 10juillet 2002; qu’ayant à nouveau saisi le même Tribunal d’une action en réparation de dommage contre la même Société EKA Benya et la Société AXA, assureur de cette dernière, Madame D était déboutée de sa demande, par Jugement n 2205/CIV3 du 21juillet 2004 par ladite juridiction; que sur appel de la susnommée, la Cour d’appel d’Abidjan infirmait le jugement entrepris et, statuant à nouveau, condamnait la Société EKA Benya à payer à l’appelante la somme de 10 000 000 (dix millions) de Francs OFA toutes causes et préjudices confondus; que sur pourvoi en cassation de la Société EKA Benya devant la Cour Suprême de Côte d’ivoire, cette juridiction, ayant relevé que l’affaire soulevait des questions relatives à l’application de l’Acte uniforme portant sur le Droit commercial général, se dessaisissait par Arrêt n 408/07 du 05 juillet 2007 au profit de la Cour de céans.
Sur la compétence de la Cour de céans soulevée d’office
Vu l’article 14 alinéas3 et 4 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique.
Attendu qu’aux termes de l’article 14 alinéas 3 et 4 du Traité susvisé qui détermine la compétence de la Cour de céans en matière contentieuse, « saisie par la voie du recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes uniformes et des Règlements prévus au présent Traité à l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales. Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel rendues par toute juridiction des Etats parties dans les mêmes contentieux ».
Attendu qu’au regard des dispositions sus-énoncées, les conditions de compétence de la Cour de céans ne sont pas réunies; qu’en effet, le litige survient dans le domaine du droit maritime, en l’occurrence, le transport par mer du sel iodé par le navire ECOWAS TRADER il ayant pour commissionnaire au transport la Société EKA BENYA; que l’absence d’Acte uniforme relatif au contrat de transport de marchandises par mer ne permet pas à la Cour de céans d’examiner cette affaire qui relève des dispositions nationales.
Attendu qu’il ressort de tout ce qui précède que la Cour de céans doit se déclarer d’office incompétente et renvoyer l’affaire à la Cour Suprême de Côte d’ivoire.
Attendu qu’il y a lieu de réserver les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré.
Se déclaré incompétente.
Renvoie la cause et les parties devant la Cour Suprême de Côte d’ivoire dont l’arrêt de renvoi ne lie pas la Cour de céans.
Réserve les dépens.
PRESIDENT : M. Antoine Joachim OLIVEIRA